05.05.2010 |

Importantes modifications de l'OMP

Entrée en vigueur le 1er janvier 2010, la nouvelle Ordonnance fédérale sur les marchés publics (OMP) apporte certains changements bienvenus pour les architectes et les ingénieurs.

Entrée en vigueur le 1er janvier 2010, la nouvelle Ordonnance fédérale sur les marchés publics (OMP) apporte certains changements bienvenus pour les architectes et les ingénieurs. Mais l'amélioration des pratiques d'adjudication dépendra essentiellement de l'application effective du nouveau texte.

La nouvelle OMP est le résultat d'une longue tentative de l'administration fédérale pour réformer la Loi et l'Ordonnance fédérales sur les marchés publics. En juin 2009, le Conseil fédéral a décidé de surseoir à la révision totale et de procéder par étapes, en commençant par une révision partielle de l'Ordonnance avant d'engager la refonte de la Loi dans un deuxième temps. La SIA soutient les objectifs fondamentaux de la révision de l'OMP: modernisation et flexibilisation de la passation des marchés et mise en place de conditions cadres propres à assurer rapidement l'efficacité des mesures conjoncturelles en cours. Malheureusement, l'administration fédérale n'a que très marginalement intégré au nouveau texte les dispositions proches de la pratique que la SIA préconisait dans sa prise de position sur la révision de la LMP en novembre 2008 (voir TRACÉS 23/2008). L'application de règles de passation des marchés conformes aux réalités professionnelles demeure donc une priorité de la SIA en 2010. Afin que ses membres puissent activement s'y associer, il est important qu'ils prennent acte des principales modifications introduites par la révision.

  • Depuis le 1er janvier 2010, la publication de toutes les invitations à soumissionner (concours, mandats d'étude et appels d'offres) passe par la plate-forme Internet pour les marchés publics simap (art. 8 al. 1 OMP). Désormais, les entités adjudicatrices peuvent également permettre la remise d'offres ou de projets sous forme électronique (art. 20 OMP). Dès que les documents lui parviennent, celle-ci doit en garantir la sauvegarde. Elle a en outre le devoir de mettre en place des mécanismes assurant l'intangibilité des dossiers remis jusqu'à l'ouverture des offres, l'enregistrement de leur date de réception, ainsi que leur inviolabilité par des tiers non autorisés.
  • L'entité adjudicatrice doit fournir une description précise des exigences relatives à la prestation demandée (art. 16a al. 1 OMP). Quant à l'appel d'offres pour des propositions "fonctionnelles" (art. 16a al. 2 OMP), il revêt une importance particulière pour les professionnels des études dans la construction: dans ce cas, l'entité adjudicatrice à la recherche de solutions ou de procédés pour répondre à un besoin peut se limiter à décrire le but du marché.
  • Par rapport à certaines solutions cantonales, l'administration fédérale a apporté une réponse plus claire à la problématique de la "pré implication". L'entité adjudicatrice exclut d'une procédure de passation les mandataires qui ont été impliqués dans sa préparation, si l'avantage qu'ils ont ainsi acquis ne peut être adéquatement compensé et si cette exclusion ne fausse pas le jeu de la concurrence (art. 21a al. 1 OMP). Les moyens appropriés pour compenser un avantage concurrentiel sont notamment la transmission de toutes les indications pertinentes sur les travaux préalables, la révélation des noms des participants à la préparation du marché et la prolongation des délais minimaux (art. 21a al. 2 OMP).
  • Une autre nouveauté d'importance pour les ingénieurs et les architectes est la codification des "mandats d'étude parallèles" (forme de mise en concurrence désignée par "Dialogue" à l'art. 26 de l'Ordonnance), en particulier la possibilité d'adjuger des prestations d'étude assorties de mandats subséquents (selon nouvelle lettre l de l'art. 13 al. 1 OMP). Indépendamment des doutes juridiques que peut soulever ce module "Dialogue" (l'art. 20 al. 2 LMP constitue-t-il une base légale suffisante?), on peut déplorer que l'art. 26 OMP ne contienne aucune référence aux règles correspondantes des organisations professionnelles, comme le fait pourtant expressément l'art. 41 OMP en matière de concours. C'est d'autant plus difficile à comprendre que l'application du Règlement SIA 143 des mandats d'étude parallèles d'architecture et d'ingénierie, publiée en octobre 2009, est recommandée par la Conférence de coordination des services de la construction et des immeubles des maîtres d'ouvrage publics (KBOB).
  • Dans le domaine des concours de projets, la réglementation du système d'évaluation (art. 27 al. 1 OMP) constitue une nouveauté bienvenue. Le principe fondamental veut que l'entité adjudicatrice indique l'ordre exact des critères d'évaluation et leur pondération. Dans certains cas particuliers, l'organisateur d'un concours de projets ou de mandats d'étude parallèles peut en revanche renoncer à la pondération lorsque le marché porte sur des solutions, des propositions de solutions ou de procédés. Une autre nouveauté est la précision apportée par l'art. 51 al. 1 OMP: le jury a désormais le devoir de garder une trace de l'évaluation qui permette de la reconstituer. Par contre, le législateur n'a malheureusement pas tenu compte des propositions de la SIA pour rapprocher le concours de projet des réalités de la pratique.
  • Lors de la mise en consultation de la loi fédérale LMP, diverses associations professionnelles ont revendiqué l'élévation des valeurs seuils dictant la procédure d'adjudication. S'alignant sur l'Accord international du 15 avril 1994 sur les marchés publics GPA, l'administration fédérale a relevé de 50'000 à 150'000 francs la valeur seuil pour la procédure de gré à gré (art. 36 al. 2 lt. b OMP).
  • La dernière modification importante pour les spécialistes des études dans la construction est la réduction des délais de paiement à en principe 30 jours (art. 29a OMP). Le Département fédéral des finances a déjà établi des directives spécifiques concernant ces délais (www.bbl.admin.ch/kbob : Publications). En rémunérant plus rapidement les prestations fournies par les concepteurs et en améliorant ainsi leur trésorerie, cette mesure doit déployer des effets positifs sur la conjoncture. En revanche, le problème posé par réduction concomitante des délais de contrôle a été signalé en vain par la SIA dans sa prise de position de septembre 2009 (voir TRACÉS 2/2010).


Dans leur ensemble, les modifications précitées devraient s'avérer favorables pour les architectes et les ingénieurs . L'application concrète de l'Ordonnance en décidera. Les instances adjudicatrices et leurs conseils sont dès lors appelés à exploiter judicieusement la marge de manoeuvre que leur laisse l'OMP pour développer des pratiques de passation des marchés équilibrées.

Daniele Graber, SIA Droit