28.05.2013 | bauwirtschaft | Beat Flach

Révision de la norme SIA 118

Quiconque opère dans la construction, doit tôt ou tard se référer à la norme SIA 118 dans le cadre de ses activités. Et pour cause: même les intervenants à l’acte de bâtir ne l’ayant jamais eue réellement sous les yeux l’appliquent.

La norme 118 s’est muée au cours des 30 dernières années en contrat standard pour les travaux de construction. On peut partir de l’idée que la plupart des ouvrages de construction en Suisse sont réalisés sur la base des dispositions contenues dans cette norme. En effet, aucun autre type de contrat ne jouit d’une diffusion et acceptation aussi grande que la SIA 118.
Vu sa forte diffusion, son jargon et, surtout, ses règles sur le déroulement du contrat se sont propagés à un tel point qu’ils sont devenus en partie des standards. Pour chaque contrat, il est important de régler de manière précise les droits et les obligations, mais aussi les processus dans le déroulement des
opérations.
Ceci est un point décisif surtout si plusieurs acteurs ayant des rôles différents collaborent au même endroit pendant une période limitée à la réalisation d’un projet. L’édification d’un ouvrage est souvent un processus dans le cadre duquel les différents acteurs oeuvrent ensemble sur un chantier et il n’est pas rare que cela ne se produise qu’une seule fois.
Cette constellation particulière ne laisse pas de temps à une procédure d’apprentissage commune. La complexité de la tâche présuppose bien au contraire que les intervenants soient au courant des règles, des responsabilités et des exigences fixées. Si les règles concernant les droits et les obligations sont axées sur la pratique et équilibrées, donc équitables, on
peut admettre qu’elles seront bien acceptées par toutes les parties en
présence.

Mais après plus de 30 ans, une révision de la norme 118 s’est avérée nécessaire. Bon nombre de modifications juridiques, mais aussi dans la pratique n’ont pas laissé leurs traces dans la norme SIA 118. Citons à titre d’exemple le remplacement en 1995 de l’impôt sur le chiffre d’affaires (ICHA) par la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Ou encore les modifications de la législation sur les marchés publics. De même, les usages pour la méthode de calcul des variations de prix se sont modifiés dans la branche de la construction. Ainsi, la méthode des pièces justificatives (MPJ), la plus usitée par le passé, a été en grande partie remplacée dans la pratique par des modèles de calcul basés sur des indices. Cela a débouché sur des questions ne pouvant plus être résolues de manière fiable par la SIA 118 de 1977.
La commission centrale des normes et règlements (ZNO/CNR) a donc chargé la commission 118 SIA de procéder à une légère révision de cette norme. Les personnes mandatées avaient pour tâche de ne pas en modifier l’équilibre. Aussi cette commission s’en est-elle tenue strictement à cette consigne pendant le processus de réforme qui s’est étendu sur plusieurs années.
Cette procédure a laissé toute la latitude requise pour un examen fouillé de toutes les facettes de la norme et des demandes issues du cercle de la commission. Après avoir examiné certains passages de la norme, les responsables sont arrivés à la conclusion qu’il ne fallait pas les modifier.
Par conséquent, certaines dispositions de la norme ont été laissées en l’état, car tout changement en aurait affecté l’équilibre. Ou alors la sécurité juridique ou l’ «équité» n’auraient plus été garanties, alors que cela correspondait à un voeu venant de différents côtés.
En font partie les risques de paiements doubles du maître d’ouvrage en cas de faillite d’un entrepreneur contractant ou la réglementation sur la durée du cautionnement solidaire pour ne citer que deux exemples de non-modification des dispositions.
Ainsi, les dispositions n’ayant intentionnellement pas été modifiées peuvent représenter de l’intérêt pour un spécialiste juridique au même titre que les changements effectifs. Seules les modifications effectives sont, bien entendu, intéressantes pour la pratique. Nous nous permettons de vous en indiquer quelques-uns ci-après.

Le terme de délai de dénonciation des défauts est mentionné dans le corps du texte et non plus dans une note en bas de page. Ainsi, on tient compte du fait qu’il s’agit de la question de validité de la dénonciation et non pas de la durée de la garantie.

Le calcul de la variation des prix est réglé différemment. La méthode des pièces justificatives (MPJ) n’est valable désormais que comme système supplétif, à défaut de méthode d’indexation. Les règles détaillées sur la MPJ, la méthode de l'indice spécifique d'ouvrage, la méthode paramétrique et l’indice des coûts de production figurent nouvellement dans des normes distinctes de la SIA (122, 123 et 124). C’est pourquoi les art. 69 - 82 ont été annulés, mais la numérotation a été maintenue.

Il a été procédé à de nombreuses adaptations linguistiques telles que «déconstruction» au lieu de «démolition» ou encore «articles distincts» au lieu
de «articles spéciaux» dans le but d’utiliser le langage actuel. De même, les responsables ont vérifié la concordance entre les versions française, allemande et italienne. Ils les ont harmonisées en partie pour garantir des énoncés de teneur équivalente et apporter la transparence requise.

Pour ce qui est du droit sur les marchés publics, la SIA 118 stipule clairement que les règles de droit public prévalent sur celles de droit privé.

Sauf convention contraire différente, la TVA n’est pas comprise dans le prix indiqué (ceci correspond à l’usage dans la construction, mais n’était pas clairement précisé à ce jour). En Suisse, les offres et les décomptes dans cette branche indiquent dans la plupart des cas les prix individuels sans TVA. C’est à la fin qu’est calculée la TVA et ajoutée ensuite au total. Si un entrepreneur (appliquant la norme SIA 118 dans son contrat) veut facturer après coup la TVA à un maître d’ouvrage n’ayant pas encore d’expérience dans ce domaine, cela pourrait avoir comme conséquence que le maître conteste le contrat sur ce point. Et ce, s’il a admis que la TVA était incluse dans le prix indiqué. Par conséquent, il est important que l’entrepreneur facture la TVA selon le système courant aux maîtres d’ouvrage intervenant une fois seulement ou pour la première fois de manière à ce que cela ressorte clairement. Dans la pratique, ce système ne sera pas très irritant, car cette règle de la norme SIA 118 correspond effectivement à la procédure appliquée par la branche de la construction.


Le choix du for juridique a été adapté aux nouvelles dispositions légales.

Sauf convention contraire, les essais de charges et autres contrôles ne se substituent pas à une réception d’ouvrage.

Les montants maximum de la retenue (5% et 10%) ont été adaptés au renchérissement depuis 1977. Dès fr. 500'000.-, la retenue est de 5% (auparavant, ce taux était déjà appliqué pour des montants à partir de fr. 300'000.-). Le montant maximal pour les retenues a été majoré, passant de fr. 1'000'000.- à fr. 2'000'000.-.

Comme jusqu’ici, les parties peuvent modifier librement les règles de la norme SIA 118. En vue de garantir un contrat qui soit le plus équilibré possible et une application fiable de celui-ci de même qu’une cohérence dans son établissement, il est recommandé de reprendre la SIA 118/2013 comme élément du contrat en n’y apportant si possible aucun changement. La construction profitera ainsi à l’avenir également d’une norme fiable et axée sur la pratique. C’est ce qui lui permettra d’éviter de nombreuses procédures judiciaires. Car en fin de compte, nous ne voulons pas nous disputer, mais
construire.


Mai 2013, Beat Flach, MLaw/SIA, conseiller national
Secrétaire juridique norme SIA 118

Beat Flach, MLaw, CAS aménagement du territoire EPF, est conseiller national (Verts libéraux), membre de la commission des affaires juridiques (CAJ), de la commission de politique de sécurité (CPS) et de la commission judiciaire (CJ) ainsi que juriste en droit de la construction et droit des contrats à la SIA. Foto: Michael Mathis, SIA