06.02.2018 | sia online | Claudia Schwalfenberg

Pavillon suisse pour la Biennale d’architecture : Svizzera 240. L’essence de l’habitat

L’architecture est-elle aujourd’hui envisageable hors de son appropriation et comment peut-elle être mise en scène de façon convaincante ? Ces questions sont au cœur de la contribution suisse pour la Biennale d’architecture 2018 à Venise. Une présentation itinérante de la SIA et de Pro Helvetia en offre un premier aperçu.

Ce qu’Alessandro Bosshard, Li Tavor et Matthew van der Ploeg projettent pour cette édition de la Biennale d’architecture de Venise est à la fois proche des gens et éloigné d’eux. Sous l’intitulé « Svizzera 240 », l’équipe d’architectes qui investira le Pavillon suisse aborde l’intérieur de logements plus ou moins standardisés, où le nombre 240 renvoie à la hauteur minimale sous plafond imposée dans la majeure partie de la Suisse. La jeune équipe s’intéresse au moment particulier où le logement est achevé, mais pas encore habité – dans le but de construire un discours sur sa spécificité architecturale.

Cette approche invite en effet au débat, comme l’a démontré une présentation itinérante du projet retenu pour la Biennale – organisée pour la première fois par la SIA et Pro Helvetia. Lors de la première à Bâle, le directeur du Musée suisse d’architecture, Andreas Ruby, a évoqué un « vide militant » et un « striptease essentiel ». Car l’architecture ne fonctionne qu’à partir d’un acte d’appropriation sociale. Et l’architecte Anna Jessen de rappeler que lors de ses études, la construction de logements n’aurait jamais pu être envisagée sans mobilier, en plaidant pour l’introduction de variantes dans l’installation prévue au Pavillon suisse.

Installation praticable
Le choix de déployer à Venise une installation praticable, afin de nourrir la réflexion sur la représentation architecturale, a en revanche suscité maints éloges. Bosshard, Tavor et van der Ploeg rompent ainsi avec la domination du plan, qui réduit l’espace tridimensionnel à une surface bidimensionnelle. Grâce à un tour du logement, ils déplacent le regard de la perception plane vers la dimension verticale, offrant ainsi une vision de l’architecture qui sollicite tous les sens en permettant d’expérimenter des stimuli sonores, olfactifs ou lumineux.

Une des impulsions majeures du concept développé pour le Pavillon vient de photos de logements achevés, mais non encore habités, tirées des sites web d’architectes suisses. Assemblées en un catalogue de vignettes, celles-ci dévoilent d’une part une « fascination pour l’architecture conventionnelle » selon Alessandro Bosshard, et d’autre part, une « subtile différentiation de l’intérieur », qui représente un phénomène typiquement suisse d’après Li Tavor. Cette approche a aussi prouvé sa fécondité discursive lors de la présentation itinérante. Anna Jessen s’interroge sur la visibilité ou le statut caricatural de la bonne architecture, tout en faisant remarquer que la juxtaposition d’objets quasi similaires stimule la perception de différences.

Président du jury du Pavillon, Marco Bakker constate que le côté artificiel des images se trouve encore rehaussé par leur association.

Débat sur le concept du Pavillon

L’ambition exprimée par l’équipe de déceler les potentiels de qualité architecturale au sein de l’espace restreint qu’elle a prédéfini a motivé une discussion sur la limitation de la hauteur sous plafond à 240 centimètres, face à la devise générale de la Biennale « Freespace ». Alessandro Bosshard a rapporté que les curatrices lui avaient effectivement conseillé de créer une installation de six mètres de haut. Or l’équipe du Pavillon suisse tient à faire la démonstration de « tout ce qui est possible avec une hauteur de 2,40 mètres ».

Par cette présentation itinérante en amont de la manifestation vénitienne, Pro Helvetia et la SIA encouragent le débat sur le concept qui occupera le Pavillon suisse et dont le déploiement à la Biennale d’architecture 2018 a pour la première fois été attribué par le biais d’un concours ouvert. Après la première à Bâle et une étape à Lausanne, une soirée suivra fin février à Mendrisio. Et dès fin mai, toutes les personnes intéressées pourront se faire leur idée de Svizzera 240 à Venise même.

Pour en savoir plus dès maintenant, des vidéos de la présentation et des discussions qui ont eu lieu à Bâle sont disponibles en ligne sous https://youtu.be/KTPeKSNUhwk et https://youtu.be/iG9LS9DqyYQ.