20.08.2013 | sia online | Jean-Pierre Wymann

«En référence au règlement SIA 142»

Afin que le règlement SIA 142 pour les concours s’applique de manière explicite, il est nécessaire que le programme contienne des dispositions contraignantes. Les formulations vagues telles que «en référence au règlement SIA 142» sont non seulement non obligatoires du point de vue juridique mais aussi trompeuses.

Si les maîtres d’ouvrage veulent utiliser le règlement SIA 142 pour les concours, ils doivent le stipuler explicitement dans le programme. Les formulations vagues telles que «en référence à» ne permettent pas de savoir quelles dispositions du règlement sont valables ou non. Les maîtres d’ouvrage qui ne veulent faire référence qu’à certains articles précis se situent, d’un point de vue juridique, sur un terrain mouvant.

Les participants doivent faire appel au principe de bonne foi pour faire accepter l’application du règlement. Ils peuvent ensuite affirmer avoir jugé en toute bonne foi que le maître d’ouvrage manifestait, par sa formulation, son intention de mettre en œuvre le règlement. Un maître d’ouvrage qui fait usage d’une formulation du type «en référence à» non seulement trompe les participants mais se porte préjudice à lui-même en étant prêt à accepter sciemment un grand flou juridique.

Les normes techniques de la SIA comportent souvent des règles d’architecture. Ces dernières sont d’une importance majeure devant les tribunaux, que les parties prenantes aient au préalable fait explicitement référence à ces normes ou non. Les règlements au contraire sont des normes dites contractuelles. Ils ne s’appliquent de manière explicite que si les parties impliquées se sont mises d’accord sur l’application des règlements concernés et le stipulent de manière contraignante. Si un maître d’ouvrage entend appliquer le règlement, il le mentionne sans équivoque dans le programme:

«Le maître d’ouvrage déclare obligatoire le règlement SIA 142 pour les concours d'architecture et d'ingénierie, édition 2009».

Si le maître d’ouvrage est soumis à la législation sur les marchés publics, les lois et les ordonnances s’y rapportant priment sur le règlement. Dans ce cas, la formule suivante s’applique:

«Le règlement SIA 142 pour les concours d’architecture et d’ingénierie, édition 2009, s’applique à titre subsidiaire par rapport aux dispositions relatives aux marchés publics.»

Appliquer le règlement à titre subsidiaire signifie que ce dernier trouve toujours application par défaut dans les cas où la législation sur les marchés publics présente des lacunes ou des dispositions non obligatoires. Les cantons et les communes manquent de règles très détaillées pour le concours d’architecture.

C’est pourquoi la législation sur les marchés publics prévoit le plus souvent la possibilité de faire référence aux dispositions pertinentes des associations professionnelles. Le canton de Vaud, dont la loi renvoie explicitement au règlement SIA 142, constitue une exception. Le renvoi explicite mentionné dans la loi ou dans le programme du concours est essentiel, car, à défaut, le règlement n’est pas forcément appliqué.

On trouve malheureusement dans les concours des maîtres d’ouvrage qui certes déclarent obligatoire le règlement SIA 142, mais excluent certains articles. L’exclusion de certains articles signifie qu’ils n’ont aucune validité. Une telle démarche crée une grande sécurité juridique, puisque tous les articles non exclus ont ainsi une réelle validité. Le procédé n’est toutefois pas loyal. Les maîtres d’ouvrage font preuve d’opportunisme en se concoctant un menu à la carte et en sélectionnant uniquement les dispositions qu’ils souhaitent appliquer, excluant toutes celles qui leur semblent présenter des inconvénients.

De nombreux participants se laissent séduire par une tâche passionnante et ne jettent qu’un coup d’œil superficiel sur les dispositions concernant la procédure. Or cela peut s’avérer risqué en cas de litige après le concours. Il y a lieu tout d’abord de préciser si le règlement afférent de la SIA a force obligatoire ou non. S’il s’avère que le programme du concours ne fait absolument pas référence aux règlements de la SIA ou que la mention en question n’est pas obligatoire, la preuve doit être apportée de manière convaincante qu’en dépit de cette formulation évasive, le maître d’ouvrage avait l’intention d’appliquer le règlement ou bien qu’il a essayé de tromper sciemment les participants.

La fondation Max Havelaar a, par exemple, créé le label Fairtrade, qui vise à améliorer les moyens de subsistance dans les pays en voie de développement, afin d’apporter une contribution concrète à un monde plus équitable. Un prestataire qui produirait «en référence» à ces standards internationaux se verrait non seulement reprocher de gruger délibérément les consommateurs mais aussi de porter préjudice au label Fairtrade. La fondation Max Havelaar aurait raison de réagir à son encontre.

Le comité de la SIA a reconnu la nécessité d’une action. Il entend désormais préserver ses membres de duperies de ce genre et mieux protéger la marque SIA. Pour ce faire, il s’adressera directement aux membres du jury et aux organisateurs qui participent aux procédures qui ne sont pas conformes aux règlements de la SIA ou qui n’imposent pas obligatoirement ces derniers afin de leur rappeler leur responsabilité en matière d’éthique professionnelle.

Conformément aux statuts de l’Association, les membres sont même tenus de respecter les règlements, directives, normes et recommandations établis par la SIA ainsi que les règles de concurrence loyale. Ils peuvent, dans un premier temps, œuvrer pour obtenir que les procédures soient vérifiées par la commission des concours et exécutées conformément aux principes des règlements de la SIA. Il va de soi également que les mandants qui excluent certains articles du règlement SIA 142 ou exécutent des procédures «en référence» au règlement ne recevront aucun label attestant de leur conformité.

Jean-Pierre Wymann, architecte EPF SIA FAS, responsable Concours et des mandats d'étude parallèles SIA